Dernier soir du mois de juin, l’humeur est légère malgré un mercure accablant... Après quelques dates annulées pour cause de nodule sur une corde vocale, la chanteuse islandaise est bien là, prête à enflammer des Lyonnais qui n’ont mis que deux heures et demi à dévaliser la billetterie de Fourvière.
Ce qui fait courir les fans de Bjork ? Une rencontre dont la rareté n’est pas marketing : chaque spectacle de Bjork est construit comme une oeuvre, chaque voix, image, instrument, son a un sens. La chateuse se donne entière, soulève, emmène son public avec générosité et énergie.
Sébastien Tellier n’a plus qu’à se rhabiller. Bjork apparaît parée de bleu électrique, surmontée d’un chigon roux façon sumo, ses choristes portent des tuniques zébrées de bronze. Elles vont conter une fable cosmique profonde, embarquer le public vers d’autres sphères dans lesquelles le verbe, le son, le ton conjuguent leurs talents au service du spectacle.
Cette tournée fait suite à la sortie de Biophilia en 2011. Ce sont ces titres qui font l’ossature de la soirée. L’album concept était une ode au tout petit, au microscopique, aux planètes, à ce qui est terrien, mais pas humain, aux atomes... Bjork reprend ce fil, et le déroule dans des vidéos diffusées sur trois écrans géants au dessus d’elle et de ses choristes. Voici un monde étrange où l’on pénètre dans les entrailles du sol comme du corps...
La voix de la chanteuse monte en puissance, le timbre emporte et fait naître l’émotion, les images saccadées hypnotisent. Dès les premiers morceaux les gradins sont conquis. Parfois, les écrans s’éteigent et ramènent le regard vers cet incroyable lutin bleu, incarné par sa musique, secoué par les rythme, complice aussi, d’un sourire, avec le public. Parfois la mise en scène se fait puissante, de vrais éclairs se déchainent au dessus de la scène, un feu d’artifice éclate au fond le temps d’un homage au volcan Eyjafjöll. Bjork et ses chanteuses s’agitent, invitent à la transe, à la danse, l’ambiance se fait électrique. D’autrefois d’anciens tubes enveloppent la foule : "Joga", "All is full of love"...
Difficile de ne pas se laisser envahir par l’émotion, tant la voix de Bjork emporte, tant ses modulations enrobent, tant sa puissance saisit. Difficile aussi de ne pas répondre avec son corps aux rythmes presque dissonnants, et finallement emballants. On est loin des tournées marathons de certains artistes qui déroulent sans cesse les mêmes grosses ficelles. Chaque venue de Bjork est un présent. Ses fans le savent, et le cercle s’aggrandit à chaque passage de cet oiseau rare.