Biophilia

Mowno, 10 octobre 2011

En regardant le monde par sa fenêtre, qu’elle soit ouverte ou fermée, Bjork doit se sentir proche de nous. Dans l’antre de ses murs, tout est redessiné. Notre présent et surtout notre futur avec lequel elle s’amuse comme un enfant s’aventurerait dans un monde encore inconnu, mais ayant déjà l’étoffe de nos souvenirs. Une nouvelle fois, l’islandaise est l’être qui tombe à pic et qui, du coup, nous convient.

L’idée de Bjork est que, de la musique à la technologie, de la biologie à l’astronomie, il n’y a qu’une infime distance de temps et qu’en unissant les uns aux autres, on obtient un objet hybride qui relie divers langages de l’art. Tout ce qui jusque-là n’était qu’idée, esquisse ou essai devient merveille, surhumain, et évoque plus de possibilités qu’on ne saurait dire. En un album, Bjork cherche à atteindre la pureté de l’instrument. Qu’il soit en acoustique chimérique ou digitale, cela importe peu, seul compte sa révolution esthétique. Bon gré mal gré, on est au sommet d’une nouvelle vague, au milieu de nulle part, belle comme son écume.

Encore une fois, “Biophilia” parvient à nous dire ce qu’on ne saurait expliquer, il ressemble à quelque chose qu’on ne saurait d’instinct nommer. Vulgairement, on le qualifiera de concept-album dantesque où les expérimentations se confondent, se rejoignent et se dispersent tous azimuts. Seul hic, son accessibilité. Pour en saisir toutes les nuances, mieux vaut se munir d’un Ipad afin de télécharger chaque chanson/application. A 1,59 euros l’unité, Bjork a vu grand, bien plus grand que notre portefeuille.

Nous sommes dans un système où il devient très difficile de bousculer les idéaux établis. On connaissait le chant Dies Irae, qui mettait en scène la voix des croyants face au Christ. En lien indirect, “Biophilia” se présente comme la mise en évidence des musiciens face aux possibilités technologiques. Concrètement, est-ce le temps des machines ? Sans trancher la question, on retiendra que, de tout temps, il a appartenu à la musique de bâtir des ponts vers l’inouï. Ainsi, suivons l’exemple de Bjork qui, d’un chant sidéral, offre une fin ouverte, mais ouverte sur l’infini.

par Maxime Delcourt publié dans Mowno