Qu’on aime ou qu’on n’aime pas, on ne peut en effet lui enlever son univers si particulier et sa liberté d’action. Björk fait bien ce qu’elle veut, quand elle le veut, et avec qui elle le veut. Sur ce dernier point, soulignons d’ailleurs qu’elle a plutôt bon goût quand il s’agit de s’entourer. Pour s’en persuader, il n’y a qu’à survoler la liste des gens avec qui elle a déjà travaillé : Tricky, Thom Yorke, Matmos, Matthew Herbert, Talvin Singh, Howie B., Rahzel, Mike Patton, Robert Wyatt, A Tribe Called Quest… Et on s’en tient au microcosme musical. La diva islandaise a autant d’entrées dans le monde du cinéma, de la mode, de la photographie, de l’art conceptuel, de la vidéo, etc.
On le savait donc déjà, personne ne dit non à Björk. Elle nous le prouve à nouveau sur ce « Volta » qui parvient à imposer sur une même affiche le nec plus ultra de la hype (cf. le producteur aux mains d’or Timbaland, le chanteur androgyne Antony…) et le talent de musiciens africains malheureusement trop souvent confinés aux seuls cercles des initiés (cf. le maître malien de la kora Toumani Diabate, les bruyants Congolais de Konono N°1…).
La dame décrivait ce nouvel album à la presse internationale comme son plus ludique, son plus insouciant. Au vu du casting, beaucoup ont voulu entendre son plus dansant. Il est certes plus rythmique que mélodique, mais on n’est quand même loin de cramer le dance-floor pour autant, n’exagérons rien…
Les morceaux où Timbaland est venu mettre son grain de sel risquent néanmoins de se retrouver dans pas mal de playlists de Dj’s à venir, comme le premier single « Earth Intruders » ou plus encore le prochain excellent « Innocence » (le meilleur titre de ce disque, à notre humble avis). Outre ces exceptions et le très punk « Declare Independence », le reste de « Volta » reste plutôt calme, et finalement pas très surprenant (« I See Who You Are », « Wanderlust », « Vertrebrae By Vertrebrae »…).
Si les cuivres ont aujourd’hui remplacés les cordes d’autrefois, rappelant ainsi par certains endroits les dernières livraisons de Antibalas ou du Youngblood Brass Band, ces fanfares ne jouent jamais dans le sens festif du terme. Elles se lancent plus volontiers dans des sortes de marches solennelles, pour ne pas dire funèbres (« The Dull Flame Of Desire », « Pneumonia »…), qui donnent à cet album des airs de bande originale de film.
Par ailleurs, la rencontre prometteuse des voix de Björk et Antony est finalement moins fusionnelle qu’on pouvait s’y attendre sur le papier. Si « The Dull Flame Of Desire » et « My Juvenile » ne sont pas foncièrement de mauvais morceaux, ils sont tous deux moins chargés émotionnellement que les œuvres respectives de leurs auteurs. Ca nous apprendra à fantasmer sur d’hypothétiques symbioses…
« Volta » se permet donc le luxe d’expérimenter de nouvelles pistes, sans sombrer dans l’autisme comme parfois. Ce qui est plutôt un bon point. De là à mettre tous ses fans d’accord, ça reste à encore voir… Le disque s’essaie à beaucoup de choses sans jamais les aboutir complètement. La politique de la bouteille à moitié pleine ou à moitié vide. L’avenir nous dira dans quelques années s’il a su contenter tout le monde… ou justement personne…